Poursuite du flambeau n°3

10/03/2019

Chers visiteurs,

Après un long moment d'absence dont je vous prie de bien vouloir m'excuser, je publie cette analyse des citations sur le désir. Je suis moins analytique que je pus l'être précédemment, mais l'essence-même du format est là. Je vous laisse sans plus attendre découvrir ceci :

"Original Catabolic Desire" sur RW2 Gallery

Messire désir à occire

 Faisons une brève présentation des intervenants : Arthur Schopenhauer était un philosophe prussien du milieu du XIXème siècle et est considéré, parfois à tort, comme le philosophe du pessimisme. Il se revendique de l'idéalisme kantien, dont il se permit toutefois de critiquer bien des points. Son écrit le plus célèbre est «Le monde comme volonté et comme représentation».

Wu Yun était un lettré taoïste de la dynastie Tang (618 à 907) représentant la tradition érémitique. On le retient de nos jours pour sa poésie notamment, mais ce fut aussi un penseur, ce qui est assez paradoxal pour un ermite. Son credo était un laissez-faire tant que la situation n'est pas propice. L'empereur Xuanzong avait réquisitionné son enseignement, mais il fuit bien rapidement la capitale pour voyager à travers la Chine.

Paul Léautaud était un auteur français né en 1872 et décédé en 1956. Il a quitté le cursus scolaire à quinze ans et s'est donc formé en autodidacte, une myriade de livres à son chevet. Grossièrement, lui-même disait que sa vie se limita à l'écriture, son «Journal littéraire» que l'on pourrait nommer intime étant l'une de ses plus célèbres œuvres.

Paule Salomon est une philosophe française née en 1940 prônant le développement personnel à la manière de Socrate et défendant «l'art d'aimer».

Françoise Giroud était une femme politique française du XXème siècle.

Ovide était un écrivain romain contemporain de Jésus Christ, notamment connu pour ses «Métamorphoses».


Ce qu'il est important de retenir à la lecture de ces textes, c'est bien que le désir pourrait être qualifié d'absurde. Dans une vie largement dénaturalisée comme celle que vivent les humains de nos sociétés, il est en tout cas devenue un fardeau, un poids que l'on traîne péniblement toute notre vie durant. Les arguments sont multiples et proviennent de plusieurs personnalités, mais attardons-nous sur celles que j'ai citées. Je vous incite néanmoins à prêter intérêt à ce qui a pu être dit ailleurs.

L'idée est finalement triviale. Lorsqu'un désir s'éveille en nous, c'est sous l'impulsion de notre nature animale, celle-ci étant régie par la nécessité de manger, boire, se reproduire, etc. Plus l'espèce est «évoluée», plus elle ressentira de désirs hors de ces besoins primaires. Communément, tant qu'un désir n'est pas assouvi, nous souffrons, et tout être vivant ordinaire abhorre la douleur, qu'elle soit physique ou mentale. Et pourtant, quand bien même nous parvenions à répondre à ces désirs, leur satisfaction n'apporte guère par rapport à ce qu'ils nous promirent. Ce n'est pas tant le fait qu'ils ne nous procurent rien une fois résolus, mais plutôt que le bonheur que nous en tirons se lasse bien vite de cette obtention, et dès lors un nouveau désir se crée facticement. Ce n'est que la conséquence directe de la réduction de la distance avec l'objet du désir. On comprend donc ce que disent Schopenhauer, Léautaud et Salomon ; à quoi bon poursuivre un idéal de plaisir inatteignable ? Pour citer une fois de plus Schopenhauer : «La vie oscille, comme un pendule, de la souffrance à l'ennui.». Rares sont les cas où exception est faite.

Surtout si l'on prend en compte le fait que l'on peut se fourvoyer sur l'existence-même du désir : en effet, soit ce peut être une erreur d'attribution sur l'objet, mais dans le plus tragique des cas, il se peut même que «l'objet du désir» n'existe pas, pour reprendre Françoise Giroud. Il me semble toutefois que la première des deux possibilités me paraît plus plausible et fréquente. Par exemple, celui ou celle qui souhaite consommer une substance psychotrope s'imagine que cela lui permettra d'en tirer une grande satisfaction. Or, une fois la drogue testée, la personne réalisera qu'elle a dépensé de l'argent et de sa santé inutilement, puisqu'en somme, l'expérience n'en valait pas la chandelle. Bien évidemment, cela peut être étendu à tout désir qui n'outrepasserait pas la loi, là ne réside pas la question. Cela fonctionne également dans le sens inverse : la plupart des humains croiront que la mort est terrible et affreuse, ils la craindront toute leur vie durant et une fois au bout de cette dernière, ils seront terrifiés sur leur lit de mort(e). Néanmoins, une fois l'arme passée à gauche, il en restera que la peur de la personne étant partie, rien ne la supplanta. On est en droit de se demander pourquoi nous sommes si affligés de voir nos proches partir, alors qu'ils eurent enfin la chance de pouvoir se libérer du joug du désir perpétuel. Nous, qui restons sur Terre, nous sommes semblables au mendiant, à espérer obtenir uniquement pour allonger notre souffrance.

Il serait pourtant vain de se laisser décourager par ce constat. Nous pouvons aller au-delà en faisant l'effort de raisonnement pour ne pas nous laisser berner par nos ardeurs. Remémorons-nous donc les paroles de Wu Yun. Nous devons employer notre esprit afin de nous détacher du monde uniquement sensible, qui est bien trop illusoire si l'on s'inspire du concept des «monde des idées et monde des formes» de Platon. Lorsque nous serons paisibles, nous ne serons plus tributaires des aléas de notre nature. Une certaine connaissance du monde qui nous entoure peut être en ce cas une bonne initiative.


Pour conclure, à défaut d'être certain de notre désir, nous devrions tâcher de garder en tête que nous ne demeurerons heureux simplement en assouvissant nos désirs, puisque ceux-ci sont par nature éphémères. Leur poursuite impliquerait que nous ne soyons pas maîtres de notre vie, puisque nous agirions selon des affects s'éveillant inopinément en nous. Il faut par conséquent prendre de la hauteur, chercher ce qui, en ce monde, nous permet de nous émanciper de notre nature instinctive, dont nous connaissons pertinemment les nombreux biais cognitifs et heuristiques douteux.

Je vous invite grandement à me communiquer ce que vous en avez pensé ! Merci d'avance, en vous souhaitant une vie harmonieuse !

Le Doute Humain - Blog de pensée
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