Poursuite du flambeau n°2

24/01/2019

Chers visiteurs,

Je sors aujourd'hui mon analyse subjective de cette citation que j'ai découverte sur un site religieux, mais qui me parut malgré tout intéressante. Il s'agit d'un écrit de Li Ao, que je présente dans l'article. Je précise, avant que vous ne vous plongiez dans la pensée chinoise, que ce n'est absolument pas une analyse historique et objective de l'écrit, mais une analyse subjective et "propagandiste" de ce que mes volitions ont souhaité en comprendre. Sur ce, j'espère que les vôtres adhéreront à ce que les miennes ont tiré de ce merveilleux texte :

"Breathe" d'Olesea Arts

Le Saint exempté de confusion

Commençons par introduire l'auteur de ce passage ; il s'agit de Li Ao, un Chinois donc. On estime qu'il est né en 772 et décédé en 836, soit sous le règne de la dynastie Tang. Il vint à bout de l'examen impérial au niveau de "doctorant" à vingt-six ans. Ayant réussi une éducation éclectique de lettré confucéen, imprégnée de calligraphie, "philosophie" (on devrait dire pensée), d'économie et de politique notamment, il put prétendre à la fonction publique et trouva un poste dans le département historique de la capitale Chang'an, aujourd'hui connue sous le nom de Xi'an. Il fut ensuite inspecteur dans le sud de la Chine dès 809.

Dans le présent extrait, et plus généralement dans le Li Wengong Ji, ouvrage dont il est issu, Li Ao cherche à bien différencier les individus en fonction de leurs agissements, de leur savoir et de leur comportement, en rappelant que la place de chacun dans la classification n'est pas rigide. Il tente en somme d'adapter le confucianisme, son courant de pensée, au bouddhisme dont l'influence ne cesse de croître. Comme toute pensée chinoise, cet exercice a très certainement une visée politique, puisqu'en Chine, la politique doit s'adapter à la réalité et non la refaçonner. Voici l'extrait que nous étudierons :


Le Saint est celui qui l'obtient sans jamais tomber dans la confusion. Les émotions, ce sont les mouvements de la nature : les hommes ordinaires sont ceux qui s'y noient sans jamais connaître son fondement. Est-ce à dire que le Saint est dénué d'émotions ? Le Saint est silencieux et immobile. Sans se déplacer, il parvient à destination ; sans parler, il communique sa force spirituelle ; sans briller, il irradie. Par ses œuvres, il forme une trinité avec le Ciel et la Terre, par ses transformations, il s'unit avec le Yin et le Yang. Bien qu'il connaisse les émotions, il n'est jamais émotif. Est-ce à dire que le commun du peuple est dénué de cette nature ? La nature d'un homme du commun ne diffère en rien à celle du Saint. Toutefois, elle est obscurcie par les émotions avec lesquelles elle est en perpétuel conflit, de sorte que l'homme du commun arrive à la fin de ses jours sans avoir eu lui-même une vision de sa propre nature.


Comprenons dans ces phrases que tout humain, de par sa nature animale, est animé par les émotions. Les émotions sont les "mouvements de la nature", c'est-à-dire que ce ne sont pas des mécanismes relevant de la conscience humaine, mais bien de ce que l'on appellerait aujourd'hui "l'évolution", qui peut être vue comme une manifestation supplémentaire de la Volonté selon Schopenhauer. Bien qu'elles aient pu avoir pour objectif la survie dans le passé, dans nos sociétés où l'humain cherche à s'émanciper de la nature en bâtissant son propre monde, elles peuvent devenir dangereuses puisqu'achever cette tâche incommensurable nécessite l'union d'une grande somme d'individus. Or, les émotions négatives auront un impact négatif sur la personne elle-même et la société dans son ensemble, qui sera alors malmenée.

Néanmoins, Li Ao estime qu'il existe des "Saints", ces personnes imprégnées d'émotions mais insoumises à ces dernières. Le Saint est celui qui, dans sa diligence, réussit à extirper du Ciel les éléments bénéfiques à la Terre. Le Ciel et la Terre, nous pourrions en faire un parallèle avec le monde des sens et le monde des formes de Platon, ou le qi (qui se prononce tchi) et le li des philosophies orientales, notamment bouddhistes. Grossièrement, le Saint est l'intermédiaire entre le savoir métaphysique inconnaissable qui se compose de l'entièreté de ce qui est dans l'univers, qu'on nomme qi et qui peut faire penser à la Volonté de Schopenhauer, et la nature matérielle, imparfaite incarnation du qi, qu'on nomme li. Cependant, la relation entre Monde et Volonté n'est pas la même que celle décrite par Schopenhauer. Si les li divergent trop, l'équilibre du qi est menacé faisant basculer le monde dans une période transitoire de laquelle peu de choses survivraient telles quelles, tandis que si li et qi convergent, la frontière entre les deux se dissipe peu à peu. Le Saint est donc celui qui se donne pour mission de se rapprocher du qi afin d'harmoniser les li sur Terre, faisant ainsi de l'univers un organisme parfait, matériel et non plus uniquement métaphysique. Pour parvenir à cette tâche, il faut être adepte du Juste Milieu, "s'unir avec le Yin et le Yang". En faisant le syncrétisme de ces deux opposés que l'on retrouve en tout, même sur le plan des idées, en étant finalement éclectique, le Saint se réforme et agira conformément à ce principe fondateur de l'univers harmonieux. Il ne se laisse par conséquent plus berner et submerger par ses émotions. Quoiqu'agir est un bien grand terme, car son savoir et sa sagesse lui permettront d'atteindre ses objectifs sans mal, de se faire entendre et respecter sans communiquer et d'insuffler cette force morale sans pouvoir conféré, qu'il eût été politique ou divin, aux autres.

Pour conclure, Li Ao souligne que le statut de Saint est accessible à tous, puisque tous les humains partagent la même nature, à savoir celle animale et consciente. Il ajoute que l'homme du commun mourra sans jamais avoir pris conscience de sa soumission à sa condition naturelle dont il ignorera l'existence. Il se sera contenté de son li, imperfection du qi qui réside en lui et autrui, en tout ce qui est matière. Si l'on remplace les émotions par les désirs, qui sont eux-aussi des spécificités de la nature animale et qui s'étendent à la nature consciente, on peut retrouver l'idée que développa Spinoza.

Je vous invite grandement à me communiquer ce que vous en avez pensé ! Merci d'avance, en vous souhaitant une vie harmonieuse !

Le Doute Humain - Blog de pensée
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